mardi 5 juillet 2011

Un nidus douloureux

A painful nidus

M. Lakouichmi, T. Dausse, D. Kamal*, P. Jammet, C. Delaval, P. Goudot, J. Yachouh

Service de chirurgie maxillofaciale et stomatologie, hoˆpital Lapeyronie,
CHU de Montpellier, 191, avenue du Doyen-Gaston-Giraud, 34295 Montpellier
cedex, France

Une patiente de 33 ans, sans ante´ce´dent pathologique
particulier, a consulte´ pour une douleur mentonnie`
re.
L’anamne`se retrouvait une douleur persistante du menton
irradiant vers l’oreille gauche, e´voluant depuis deux ans.
Cette douleur a` pre´dominance nocturne e´tait calme´e par la
prise de 1 g d’aspirine. L’examen clinique objectivait une
douleur a` la pression symphysaire sur son versant lingual. La
muqueuse e´tait intacte sans signes inflammatoires ni fistule.
Le test de vitalite´ dentaire de toutes les dents de la
re´gion symphysaire e´tait normal. L’interrogatoire et
l’examen clinique ge´ne´ral n’ont pas re´ve´le´ d’autre pathologie.
La radiographie panoramique dentaire ne mettait pas en
e´vidence de le´sion.
Le scanner re´ve´lait une petite image hyperdense, he´te´roge`ne
avec un lisere´ pe´riphe´rique hypodense, appendu a` la corticale
poste´ro-infe´rieure de la re´gion parasymphysaire gauche
(fig. 1 et 2), mesurant 7,5 par 4,5 mm.
La scintigraphie montrait un foyer intense d’hyperfixation

Figure 1. Image scannographique de la le´sion en coupes axiale et sagittale.

Figure 2. Image scannographique de la le´sion en trois dimensions montrant le nidus sur le versant lingual de la symphyse mandibulaire.

Re´ponse
Il s’agissait d’un oste´ome oste´oı¨de
La confirmation a e´te´ obtenue par l’e´tude histologique apre`s
l’exe´re`se chirurgicale par voie cutane´e. Les suites ope´ratoires
ont e´te´ marque´es par un he´matome du plancher buccal qui
s’est amende´ progressivement, les douleurs ont disparu, et
aucune re´cidive n’a e´te´ note´e.
L’oste´ome oste´oı ¨de est une tumeur de la ligne´e oste´oblastique,
conside´re´e comme be´nigne, mais tre`s douloureuse.
Elle touche pre´fe´rentiellement l’adolescent et l’adulte jeune
de sexe masculin et peut atteindre tous les os, avec une
pre´dominance pour les os longs [1].
La localisation mandibulaire est beaucoup plus rare, peu
rapporte´e (dix localisations maxillomandibulaires dans la
litte´rature anglaise) [2]. Son incidence est de 2 a` 3 % de
l’ensemble des tumeurs osseuses toutes localisations
confondues [1]. Jones et al. [2] rapportent que les premiers
cas ont e´te´ de´crits par Jaffe en 1935.
Il s’agit d’une le´sion de forme arrondie, toujours infe´rieure a`
2 cm, constitue´e d’un nidus radioclair entoure´ d’une zone de
radioscle´rose. La douleur provoque´e par cette tumeur
be´nigne justifie l’intervention. Par ailleurs, elle peut conduire
a` des de´formations morphologiques de l’os atteint et/ou a`
des synovites [3].
La triade clinique pathognomonique [3] comporte une douleur
persistante, a` pre´dominance nocturne, d’installation
insidieuse, re´pondant a` l’aspirine ou aux anti-inflammatoires
non ste´roı ¨diens ; une oste´ocondensation avec ou sans nidus
radiologique sur la radiographie standard, (ou nidus avec
oste´ocondensation pe´riphe´rique) et une hyperfixation scintigraphique
au temps vasculaire pre´coce.
Il ne faut pas confondre cette tumeur avec l’oste´oblastome
ou oste´ome oste´oı ¨de ge´ant, qui est moins douloureux et plus
volumineux (taille supe´rieure a` 2 cm) [1,2].
Des cas de gue´rison spontane´e ont e´te´ rarement de´crits ne
survenant qu’au bout de nombreuses anne´es d’e´volution
de sorte que l’abstention the´rapeutique n’est pas envisageable
[3].
Le traitement de re´fe´rence est la chirurgie a` ciel ouvert.
L’exe´re`se du nidus, qui repre´sente la partie tumorale de la
le´sion, conduit a` une gue´rison de´finitive [1].
La difficulte´ majeure re´side dans le repe´rage perope´ratoire,
qui conduit parfois a` pratiquer une exe´re`se e´largie. Le
scanner est la me´thode de choix pour le diagnostic et
l’e´valuation du nidus et c’est pourquoi le radioguidage scannographique
a e´te´ envisage´ comme une technique d’assistance
au geste chirurgical [4]. D’autres techniques
chirurgicales ont e´te´ de´crites : re´section par voie percutane´e
ou extraction me´canique ( a` la tre´phine, au trocard) et
destruction par voie transcutane´e ou thermique (par photocoagulation
laser, par radiofre´quence) [4]. Toutefois ces
techniques seraient plus indique´es pour les oste´omes
oste´oı¨des de sie`ge verte´bral et du membre infe´rieur [4],
aucune expe´rience n’a e´te´ rapporte´e sur des localisations
maxillofaciales.


Re´fe´rences

1. Chung Ji Liu, Kuo Wei Chang, Kuo Ming Chang, Chieb Yuan
Cheng. A variant of osteoid osteoma of the mandible: report of a
case. J Oral Maxillofac Surg 2002;60:219–21.
2. Jones AC, Prihoda TJ, Kacher JE, Odingo NA, Freedman PD.
Osteoblastoma of the maxilla and mandible: a report of 24
cases, review of the literature, and discussion of its relationship
to osteoid osteoma of the jaws. Oral Surg Oral Med Oral Pathol
Oral Radiol Endod 2006;102:639–50.
3. Haddad E, Ghanem I, Wicart P, Samaha E, Kharrat A, Aoun N,
et al. Thermocoagulation percutane´e scannoguide´e de
l’oste´ome oste´oı ¨de. Rev Chir Orthop Reparatrice Appar Mot
2004;90:599–606.
4. Cantwell CP, Obyrne J, Eustace S. Current trends in treatment of
osteoid osteoma with emphasis on radiofrequency ablation. Eur
Radio 2004;14:607–17.




Tumeur ge´ante du plancher de la bouche

Giant tumour of the mouth floor

A. Ortiz1, P. Laime1, F. Gabler2, M.A. Inostroza3, R. Pantoja3*

1 Unite´ de chirurgie de la teˆte et du cou, hoˆpital clinique San Borja-Arriara´n, Santiago, Chili
2 Service d’anatomie pathologique, hoˆpital clinique San Borja-Arriara´n, Santiago, Chili
3 Unite´ de chirurgie maxillofaciale, hoˆpital clinique San Borja-Arriara´n, Santiago, Chili

Une jeune femme de 23 ans, d’origine colombienne,
sans ante´ce´dent pathologique, pre´sente une volumineuse
tume´faction du plancher buccal. La
tumeur repousse la langue en arrie`re, alte´rant se´ve`rement
la phonation et la de´glutition. La de´formation touche la
re´gion sous mentale ( fig. 1 et 2). Cette tumeur est connue
depuis dix ans, elle a e´te´ ponctionne´e et aspire´e a` plusieurs
reprises dans son pays, toujours avec une re´cidive pre´coce.
La palpation bimanuelle confirme le caracte`re unique de la
tumeur. Elle est indolore et fluctuante. L’image scanner montre
une e´norme le´sion kystique, bien contourne´e. E´ trangle´e
par lemusclemylohyo¨ıdien, elle a un aspect en sablier ( fig. 3).

Figure 1. Vue endobuccale de la le´sion.

Figure 2. La tume´faction sous-mandibulaire vue de profil.

Figure 3. Coupe tomodensitome´trique frontale montrant l’image en sablier.


Re´ponse
Le diagnostic de kyste dermoı¨de a e´te´ confirme´ par
l’exe´re`se chirurgicale. L’intervention a e´te´ mene´e par voie
cervicale transverse, en re´se´quant les nombreuses cicatrices
de ponctions. Le kyste a e´te´ e´nucle´e´ sans difficulte´ ( fig. 4). La
muqueuse buccale e´tait indemne. L’examen anatomopathologique
retrouvait des glandes se´bace´es associe´es au reveˆ-
tement e´pidermique.
Les kystes dermoı¨des sont de´rive´s des inclusions ectodermiques
produites par la fusion des processus embryonnaires. Ils
peuvent eˆtre pre´sents de`s la naissance ou se manifester dans
les deux premie`res de´cades de la vie [1,2]. Sans pre´dilection
de sexe, ils se pre´sentent comme une masse mobile, lisse, de
taille variable, de croissance lente et asymptomatique le plus
souvent. La localisation au niveau du plancher buccal est
assez rare. Plus rarement encore, occupe-t-il les deux
compartiments sous-lingual et sous-mandibulaire.
Les kystes dermo¨ıdes sont compose´s d’e´le´ments dermiques ou
e´pidermiques et leur cavite´ peut contenir de la ke´ratine. Le
scanner et l’IRM sont utiles au diagnostic. Une e´tude cytologique
apre`s ponction a` l’aiguille fine peut eˆtre utile [3]. Une
tume´faction cervicaleme´diane peut faire e´voquer un kyste du
tractus thyre´oglosse, un pseudokyste salivaire, voire un kyste
branchial. Le traitement de choix est l’e´nucle´ation chirurgicale.
Les re´cidives sont rares et les suites simples bien qu’il ait
e´te´ rapporte´ une transformation maligne [4].

Figure 4. Vue perope´ratoire de la le´sion au moment de l’exe´re`se.


Re´fe´rences

1. Bascones A. Llanes F. Medicina bucal, Madrid: E´ ditorial Avances.
Me´dicos Dentales 1996; 395–6.
2. Neville BW, Damm DD, Allen CM, Bouquot JE. Oral & maxillofacial
pathology. Philadelphia: Saunders; 1995. p. 29.
3. Babuccu O, Isiksac¸an Ozen O, Hosnuter M, Kargi E, Babuccu B.
The place of fine-needle aspiration in the preoperative diagnosis
of the congenital sublingual teratoid cysts. Diagn Cytopathol
2003;29:33–7.
4. Devine JC, Jones DC. Carcinomatous transformation of a sublingual
dermoid cyst. A case report. Int J Oral Maxillofac Surg
2000;29:126–7.




Présentation inhabituelle d’une pathologie courante

I. Loeb, M. Shahla

Service de Stomatologie et Chirurgie Maxillo-faciale (Pr J. Van Reck), CHU Saint-Pierre, Bruxelles, Belgique

Un patient âgé de 80 ans, d’origine marocaine, est
admis dans le département de chirurgie maxillofaciale,
pour des lésions faciales et buccales très douloureuses,
évoluant depuis environ une semaine.
La biologie exprime un syndrome inflammatoire.
L’examen clinique montre la présence d’un érythème hémifacial
droit recouvert de lésions de type « vésicules » à différents stades
d’évolution (fig. 1). Ces lésions évoluent sur l’ensemble du territoire
du nerf trijumeau droit, à savoir : les régions temporale, sousorbitaire,
pré-auriculaire, paranasale et commissurale, les hémilèvres
supérieure et inférieure avec la région mentonnière, l’hémipalais,
la joue et l’hémi-langue droits (fig. 2 et 3). Le conduit auditif
externe est respecté ainsi que la paupière supérieure. On note
également la présence d’adénopathies cervicales unilatérales.
Dans les antécédents de ce patient on retrouve une bronchopneumopathie
chronique obstructive, un diabète insulinodépendant
équilibré, une cardiomyopathie ischémique et un
syndrome du tako-tsubo.



Figure 1. Patient vu de profil

Figure 2. Lésions hémi-langue droite.

Figure 3. Lésions palais et joue droits


Réponse

Il s’agit d’un zona du nerf trijumeau entreprenant ses trois
branches.
Le nerf trijumeau, sensitivo-moteur, anime les muscles de la
mastication et donne la sensibilité à la face, l’orbite, les fosses
nasales et la cavité buccale. Les fibres sensitives prennent naissance
dans le ganglion de Gasser.
Le nerf trijumeau se compose de trois branches : ophtalmique,
maxillaire supérieur et mandibulaire. C’est la branche ophtalmique
qui est la plus fréquemment atteinte en cas de zona. S’il
est habituel de retrouver une atteinte zostérienne trigéminale
d’une ou deux branches du nerf, l’atteinte simultanée des trois
branches est exceptionnelle.
Le zona est une infection localisée, unilatérale, due à la réactivation
du virus de la varicelle, « varicelle-zoster » (VZ), virus à
DNA [1]. Cette affection se rencontre plus fréquemment chez
les sujets âgés ou immunodéprimés, sans prédilection de sexe
ou de race.
L’éruption vésiculeuse est habituellement précédée de douleurs,
parfois intenses, allant d’un simple prurit à de véritables
sensations de brûlures. Le patient se plaint parfois avant
l’apparition des lésions cutanéo-muqueuses, de paresthésies
ou hyperesthésies dans le territoire du dermatome concerné.
Les signes généraux accompagnateurs sont peu fréquents :
malaise, céphalées ou encore pyrexie [2].
Les adénopathies réactionnelles unilatérales sont habituelles.
Les vésicules apparaissent le plus souvent groupées et évoluent
sur un fond érythémateux. Elles se rompent au bout
d’une dizaine d’heures, et laissent la place à une petite ulcération
rapidement recouverte d’une croûte qui peut persister
plusieurs semaines. De nouvelles vésicules peuvent apparaître
pendant plusieurs jours ce qui explique le tableau clinique
classique de lésions cutanéo-muqueuses à différents stades
d’évolution.
Le diagnostic, principalement clinique, peut être confirmé
par l’isolement du virus à partir des fluides des vésicules (culture
ou immunofluorescence) ou encore par des tests sérologiques.
Le diagnostic différentiel, difficile en phase pré-éruptive, se
pose lors de l’éruption avec une infection bactérienne (impétigo),
un herpès zostériforme, une dermatite de contact ou
encore une brûlure.
La pathogénie de cette affection n’est pas encore complètement
élucidée. Au cours de l’épisode de varicelle (primo-infection),
le virus « varicella-zoster » (VZ) présent en grande
quantité dans les lésions cutanéo-muqueuses progresse de
manière centripète vers le ganglion où il reste latent [3]. Sa
réactivation est relativement rare et sporadique, mais peut
parfois correspondre à certaines situations telles que : la prise
d’immunosuppresseurs ou de corticoïdes, l’existence d’une
néoplasie, d’un traumatisme local…
Le traitement habituel dont a, par ailleurs, bénéficié notre
patient consiste en l’administration d’acyclovir (Zovirax• )
3 x 500mg/jour en IV lente, de paracétamol (Perfusalgan• )
3 x 1 g/jour en IV, de gabapentine (Neurontin•) 3 x 300 mg
per os, et d’un complexe vitaminé B1-2-6-12 (Befacte forte• )
3 comp./jour [4].
La complication majeure du zona est la névralgie post-zostérienne,
souvent accompagnée d’hypoesthésie du territoire
atteint. Elle se retrouve dans 10 à 15 % des cas, apparaît après la
disparition des croûtes et peut persister plusieurs mois. Son
incidence augmente avec l’âge et elle est relativement rebelle
aux traitements classiques.
En cas de zona ophtalmique on peut observer des complications
plus spécifiques telles que des ulcérations cornéennes,
des rétractions palpébrales, une ptose paralytique, une névrite
optique…



Références
1. Carbone V, Leonardi A, Pavese M, Raviola E, Giordano M. Herpes
zoster of the trijeminal nerve: a case report and review of the literature.
Minerva Stomatol 2004;53:49-59.
2. Piette E, Reychler H. Traité de pathologies buccale et maxillofaciale.
De Boeck Université, 1991:390-2.
3. Kennedy PG. Key issues in varicella-zoster virus latency. J Neurovirol
2002;8:80-4.
4. Watson CP. Management issues of neuropathic trigeminal pain
from a medical perspective. J Orofac Pain 2004;18:366-73.



jeudi 30 juin 2011

Pathologie de la muqueuse buccale

L. Ben Slama

Service de Stomatologie et de Chirurgie Maxillo-Faciale,Hôpital de la Salpêtrière, 45, Bd de l’Hôpital, 75013 Paris.
Tirés à part : L. Ben Slama, Service de Stomatologie et de Chirurgie Maxillo-Faciale, Hôpital Tenon, 4 rue de Chine, 75020 Paris.

CAS No 2

Une jeune fille de 21 ans se présente à la consultation
avec de multiples nodules de 4 à 5 mm de diamètre au
niveau de la pointe et des bords marginaux de la langue
et de la lèvre supérieure, apparus en quelques semaines,
occasionnant une gêne discrète à l’élocution. Le reste de
l’examen clinique est normal, en particulier, il n’y a pas de
lésion cutanée notable. Un bilan biologique réalisé en ville
est normal, incluant une sérologie VIH 1 et 2 négative.
Dans les antécédents, la patiente signale un phéochromocytome
surrénalien diagnostiqué et traité 2 ans auparavant.
Un nodule thyroïdien récemment découvert est en
cours d’exploration

Figure 1 : Multiples nodules de 4 à 5 mm de diamètre au niveau de la
pointe et des bords marginaux de la langue et de la lèvre supérieure.



Figure 2 : Histologie (HES X 25). Epithélium d’aspect normal, les nodules
étant constitués de multiples filets nerveux entourés d’un périnèvre
épaissi.



Réponse

Les nodules observés, de petite taille, sont localisés, circonscrits
et font évoquer d’emblée des tumeurs bénignes.
Les diagnostics évoqués ont été fibromes, verrues, neurofibromes
ou fibro-xanthomes. Les verrues et neurofibromes
paraissaient peu probables en absence de lésions
cutanées associées ou de contexte d’immuno-dépression
pouvant justifier la présence de multiples lésions buccales
à human papilloma virus (hpv).
Cinq nodules de la pointe de la langue ont été enlevés
sous anesthésie locale et adressés à l’anatomopathologiste
(fig. 2). Le compte-rendu note un épithélium
d’aspect normal, les nodules étant constitués de multiples
filets nerveux entourés d’un périnèvre épaissi. Ce caractère
permet d’exclure le diagnostic de névromes solitaires.
Le diagnostic retenu est celui de névromes myéliniques,
évoquant une maladie héréditaire pouvant associer ce
tableau à un cancer médullaire thyroïdien. Lors de la consultation
de contrôle, la patiente confirme ce diagnostic,
aboutissement de l’exploration signalée. Elle est prise en
charge en endocrinologie pour complément de bilan et
traitement.
L’association d’une neurofibromatose de von Reclinghausen
et d’un phéochromocytome est relativement
courante, mais les névromes muqueux multiples sont toujours
associés aux signes cutanés de cette maladie, et la
distribution des lésions muqueuses est différente. L’association
de multiples neurofibromes muqueux à un phéochromcytome
et à un carcinome médullaire thyroïde fait
partie des syndromes des néoplasies endocrines multiples
(« multiple endocrine neoplasia syndrome » ou « MEN
syndrome »). Trois types différents sont actuellement distingués.
Le cas présenté correspond au IIb associant à la
triade décrite une hyperplasie des nerfs cornéens. Habituellement,
les névromes muqueux apparaissent longtemps
avant les pathologies malignes associées dans ces
syndromes, ce qui présente un réel intérêt de dépistage.
L’étio-pathogénie de ces multiples néoplasies endocrines
s’explique par un trouble métabolique survenant lors
de la migration des cellules d’origine neuro-ectodermique
à partir des crêtes neurales, les unes se différenciant en
cellules glandulaires, les autres en tissus nerveux



RÉFÉRENCES
1. Jain S, Watson MA, DeBenedetti MK, Hiraki Y, Moley JF,
Milbrandt J. Expression profiles provide insights into early malignant
potential and skeletal abnormalities in multiple endocrine
neoplasia type 2B syndrome tumors. Cancer Res, 2004;64:
3907-13.
2. Lee NC, Norton JA. Multiple endocrine neoplasia type IIb.
Genetic basis and clinical expression. Surg Oncol, 2000;9:111-8.
3. Edwards M, Reid JS. Multiple endocrine neoplasia syndrome
type IIb: a case report. Int J Paediatr Dent, 1998;8:55-60.
4. Cribier B, Grosshans E. Tumeurs cutanées nerveuses rares. Ann
Dermatol Venereol, 1997;124:280-95.
5. Joshi VV, Silverman JF. Pathology of neuroblastic tumors. Sem
Diagn Pathol, 1994;11:107-17.
6. Ayala F, DeRosa G, Scippa L, Vecchio P. Multiple endocrine neoplasia,
type IIb. Dermatologica, 1981;162:292-9.
7. Rashid M, Khairi A, Dexter RN, Burzynski NJ, Johnson CC. Mucosal
neuroma, pheochromocytoma and medullary thyroid carcinoma:
multiple endocrine neoplasia. Medicine, 1975;54: 89-112.





Papillomatose buccale



Il s’agit d’un patient de 45 ans qui présentait une papillomatose
buccale étendue au palais et à l’épiglotte qui est complètement
envahie et infiltrée obstruant l’accès à l’orifice glottique
(fig. 1)
.
Après une simple laryngoscopie, la glotte est visualisée avec difficulté
et peut être intubée
(fig. 2).


Pathologie de la muqueuse buccale

L. Ben Slama

Service de Stomatologie et de Chirurgie Maxillo-Faciale,Hôpital de la Salpêtrière, 45, Bd de l’Hôpital, 75013 Paris.
Tirés à part : L. Ben Slama, Service de Stomatologie et de Chirurgie Maxillo-Faciale, Hôpital Tenon, 4 rue de Chine, 75020 Paris.

CAS No 1
Un homme de 34 ans consulte à la demande d’un confrère
hospitalier pour traitement de lésions gingivales évoluant
depuis plusieurs mois, augmentant progressivement
de volume, devenant douloureuses et saignotant lors du
brossage. Le patient a bénéficié deux ans auparavant
d’une greffe rénale ayant entrainé la prise de Mycophénolate
mofétil (Cellcept® 750 mg/j), Prednisone (Cortancyl®
10 mg/j) et Ciclosporine (Néoral® 150 mg/j). L’examen clinique
confirme la présence d’une hypertrophie gingivale
localisée dans le seul secteur antérieur des maxillaires.
Celle-ci est par endroits inflammatoire, associée à la présence
de plaque dentaire.


Quel est votre diagnostic ?

Figure 1 : Lésions gingivales évoluant depuis plusieurs mois.

Réponse
Le diagnostic dans ce cas est relativement simple : il s’agit
d’une hypertrophie gingivale liée à la prise de ciclosporine.
Elle atteint essentiellement les papilles inter-dentaires, qui
sont de couleur rose pâle et de consistance ferme. Sa fréquence
est variable, de 15 à 80 %. Elle apparaît 3 à
4 mois après le début du traitement, mais parfois plus tôt
ou beaucoup plus tard, avec une intensité dépendante de
la dose. La mauvaise hygiène bucco-dentaire joue un rôle
important.
L’hypertrophie gingivale se caractérise histologiquement
par une hyperplasie du tissu conjonctif et des vaisseaux et
l’association d’une fibrose et d’infiltrats inflammatoires
lympho-plasmocytaires.
Il n’y a pas lieu de réaliser une biopsie préalable, la confirmation
histologique pouvant être apportée lors de l’examen
de la pièce d’exérèse.
Dans ce cas précis, le traitement a consisté d’abord en
l’élimination mécanique de la plaque dentaire, suivie de
deux cures d’azithromycine (Zithromax® 250 mb, 2 cps/j
pendant 3 j, arrêt une semaine puis reprise selon le même
mode, hors AMM). Ceci a entraîné une réduction de près
de 50 % de l’hypertrophie gingivale. En raison de la gêne
fonctionnelle et esthétique, une gingivectomie au bistouri
électrique a été réalisée sur le volume excédentaire résiduel.
La récidive étant inéluctable si la ciclosporine est continuée
à la même posologie, une recommandation de diminution
de la posologie avec suppléance par d’autres
immunodépresseurs, dans la mesure du possible, a été
faite au prescripteur. Le patient a été incité à une hygiène
plus rigoureuse.




RÉFÉRENCES
1. Doutre MS. Ciclosporine. Ann Dermatol Venereol, 2002;129:
392-404.
2. Salard D, Parriaux N, Derancourt C, Aubin F, Bresson-Hadni S,
Miguet J-P, Laurent R. Manifestations dermatologiques chez les
transplantés hépatiques. Ann Dermatol Venereol, 2002;129:
1134-8.
3. Rateitschak-Plüss EM, Hefti A, Lörtscher R, Thiel G. Initial observation
that cyclosporin-A induces gingival enlargement in man.
J Clin Periodontol, 1983;10:237-46.
4. Pisanty S, Rahamim E, Ben-Ezra D, Shoshan S. Prolonged systemic
administration of cyclosporin A affects gingival epithelium.
J Periodontol, 1990;61:138-41.
5. Daly CG. Resolution of cyclosporin A (CsA)-induced gingival
enlargement following reduction in CsA dosage. J Clin Periodontol,
1992;19:143-5.
6. Seymour RA, Smith DG. The effect of a plaque control programme
on the incidence and severity of cyclosporin-induced
gingival changes. J Clin Periodontol, 1991;18:107-11.





Ostéonécrose des maxillaires chez des patients traités par bisphosphonates

S.Abi Najm1, S. Lysitsa1
J.-P. Carrel1, P. Lesclous2
T.Lombardi1, J.Samson


Summary

Bisphosphonates-related jaw osteonecrosis
Introduction The latest generations of bisphosphonates constitute
a major advance in the management of disorders including Paget’s
disease, osteoporosis, and osteolytic bone tumors. Recent reports
describe numerous cases of osteonecrosis of the jaw in patients
treated with bisphosphonates. Some of these reports mention
predisposing factors, including surgical procedures, chemotherapy,
and radiotherapy.
Cases In the past 12 months, we have observed and treated 9 cases
of maxillary osteonecrosis, which we present summarily.
Discussion Some of our cases (3 of 9), like many of those described
in literature, do not present predisposing factors. The osteonecrosis
may thus be due mainly to the effect of bisphosphonates that, by
blocking bone remodeling, may cause excessive bone
mineralization. If this hypothesis is confirmed, these cases of
osteonecrosis may be due to excess doses. Better dose adjustment
should thus help prevent this complication.

S. Abi Najm, S. Lysitsa, J.-P. Carrel,
P. Lesclous, T. Lombardi, J. Samson
Presse Med 2005; 34: 1073-7
© 2005, Masson, Paris

Résumé

Introduction Les bisphosphonates de dernières générations
constituent un progrès important dans la prise en charge de
certaines affections: maladie de Paget, ostéoporose et tumeurs
osseuses ostéolytiques. Plusieurs cas d’ostéonécrose des maxillaires
viennent d’être rapportés chez des patients sous bisphosphonates.
Des facteurs favorisants ont été évoqués: intervention chirurgicale,
chimiothérapie, radiothérapie, etc.
Observations En 12 mois, 9 cas d’ostéonécrose des maxillaires ont
été observés et traités; ils sont présentés de façon synoptique.
Discussion Comme dans la littérature, dans plusieurs des cas
rapportés (3 sur 9), on ne trouve aucun facteur favorisant. On peut
donc se demander si l’ostéonécrose ne serait pas principalement
due à l’effet des bisphosphonates qui, en bloquant le remodelage
osseux, entraînerait une minéralisation excessive de l’os. Si cette
hypothèse se confirmait, l’ostéonécrose résulterait d’un surdosage
et une meilleure adaptation de la posologie devrait permettre
d’éviter cette complication

Les bisphosphonates sont des analogues structuraux
des pyrophosphates inorganiques, principalement
prescrits pour inhiber l’activité des ostéoclastes.
Selon que le radical contient ou non un atome
d’azote, on distingue 2 formes de bisphosphonates: les
bisphosphonates sans groupe amine (clodronate, étidronate,
tiludronate, etc.) et les aminobisphosphonates
(pamidronate, risédronate, alendronate, ibandronate,
zolédronate, etc.) qui représentent les produits de dernières
générations1.Tous les bisphosphonates commercialisés
ne sont pas métabolisés.
Les aminobisphosphonates ont de multiples actions:
• après avoir adhéré à l’hydroxyapatite de la trame
osseuse minérale, ils sont absorbés sélectivement par
les ostéoclastes, ce qui aurait pour effet d’induire leur
apoptose2;
• ils ont une action anti-tumorale propre3;
• ils ont une action anti-inflammatoire en inhibant
certaines cytokines4;
• ils ont une action anti-angiogénique5.
En 3 décennies, les indications des bisphosphonates
se sont progressivement élargies: après avoir été initialement
utilisés dans la maladie osseuse de Paget, ils
sont actuellement prescrits pour le traitement et la
prévention de l’ostéoporose6,7, pour le traitement de
l’hypercalcémie maligne et des tumeurs osseuses
d’origine hématologique ou métastatique8,9 qui s’accompagnent
d’une ostéolyse, et plus récemment pour

le traitement de la nécrose aseptique de la hanche10,
du syndrome Sapho4, etc. Ils contribuent à traiter les
symptômes liés à ces différentes affections et ils sont
souvent prescrits au long cours, surtout en carcinologie.
L’ostéonécrose des maxillaires, secondaire à la
prise de bisphosphonates, est une complication
décrite récemment dans la littérature11-17.
En 12 mois, 9 cas d’ostéonécrose ont été découverts
dans la division de stomatologie, de chirurgie orale et
radiologie dento-maxillo-faciale de la Faculté de Médecine
de Genève.
Observations
Le premier patient (cas n°1) avait une ostéonécrose
maxillaire, secondaire à la prise de bisphosphonates.
Venu consulter pour une infection d’origine dentaire,
le tableau clinique s’est avéré atypique et l’os alvéolaire
périradiculaire semblait nécrosé. Après extraction
des 2 dents causales qui étaient les seules dents
maxillaires restantes, l’évolution n’a pas été favorable
et on a observé une exposition osseuse s’étendant
progressivement. Elle a nécessité la réalisation d’une
maxillectomie subtotale; l’examen histopathologique
a confirmé le diagnostic d’ostéonécrose.
En 12 mois, 8 autres cas ont été observés.
Ces 9 patients étaient 3 hommes et 6 femmes dont
l’âge était compris entre 45 et 85 ans (âge moyen
73 ans) (tableau 1). Les bisphosphonates ont été
prescrits pour le traitement des affections suivantes:
myélome multiple, cancer du sein, adénocarcinome
prostatique, ostéoporose. Dans ces 9 cas, on a observé
12 foyers d’ostéonécrose dont les localisations étaient
les suivantes : 7 atteintes mandibulaires (dont une
double localisation), 3 maxillaires et 1 bimaxillaire.
Cinq foyers d’ostéonécrose sont apparus après une
extraction dentaire, 1 après ablation d’implants dentaires
et 6 spontanément.
Cliniquement, l’atteinte osseuse ressemblait plus à
une ostéoradionécrose qu’à une ostéomyélite: exposition
osseuse, spontanée ou provoquée, le plus souvent
après extraction dentaire, sans aucune tendance
à guérir spontanément car le séquestre ne se détache
pas et l’atteinte osseuse semble s’étendre (figure 1).


Le bilan radiologique comporte systématiquement un
orthopantomogramme (figure 2), parfois un examen
tomodensitométrique (figure 3), une scintigraphie
osseuse (figure 4).
Dans chaque cas, l’examen histopathologique a
confirmé le diagnostic de nécrose osseuse; aucune
cellule tumorale n’a été observée (figure 5) lorsque
le traitement avait été prescrit pour une tumeur
maligne.
Dans tous les cas, on a réalisé une séquestrectomie
après une antibiothérapie (amoxicilline 750 mg 3xj-1
et métronidazole 250 mg 3xj-1) de 7 à 10 jours en
moyenne, temps nécessaire pour obtenir une cicatrisation
muqueuse suffisante.
Commentaires
Les bisphosphonates, molécules utilisées depuis les
années 1970, constituent un progrès thérapeutique
important pour le traitement de la maladie de Paget18,
de l’ostéoporose6,7 et des tumeurs osseuses ostéolytiques
8,9. Ils réduisent de façon importante (de 20 à
60 % selon les auteurs) la fréquence des manifestations
liées à l’atteinte osseuse, en diminuant les douleurs,
les fractures pathologiques, les compressions
radiculaires ou médullaires et les épisodes d’hypercalcémie
8. Leurs indications sont de plus en plus
vastes et on estime que 2,5 millions de patients ont
été traités par pamidronate et zolédronate depuis leur
mise sur le marché19.
La Food and Drug Administration (FDA) a donné l’autorisation
de mise sur le marché (AMM) au pamidronate
en 1994, pour le zolédronate en 2001; en France,
les AMM ont été obtenues quelques mois plus tard.
Les maxillaires semblent les seules structures
osseuses touchées; ceci pourrait s’expliquer par une
continuité de la muqueuse de recouvrement qui mettrait
en relation l’os avec le milieu septique de la
cavité buccale.
Le développement de l’ostéonécrose survenait après
un acte chirurgical, le plus souvent une extraction
dentaire, ou de façon apparemment spontanée. Le
traitement proposé dépend de la localisation des
lésions et de leur dimension.
Aucun cas n’a été traité par oxygénothérapie hyperbare
dont l’efficacité semble aléatoire14,16.
Les limites du séquestre sont difficiles à évaluer car
l’os “sain” périphérique apparaît très remanié et peu
vascularisé; si la séquestrectomie est insuffisante, l’exposition
osseuse persiste ou récidive. Sauf contre-indications
d’ordre général, il n’y a aucune raison de laisser
évoluer un foyer d’ostéonécrose.

Figure 1 Ostéonécrose dans la région maxillaire antérieure (cas n° 1) : exposition
osseuse qui s’est étendue progressivement après l’extraction de deux dents restantes
et ayant nécessité la réalisation d’une maxillectomie subtotale.

Figure 2 Orthopantomogramme (cas n° 2) : perte spontanée de la deuxième molaire
inférieure avec exposition progressive de la table interne de la mandibule.



Figure 3 Examen tomodensitométrique (cas n° 3) : lyse osseuse dans la région
de la première molaire supérieure droite 6 mois après l’extraction, accompagné
d’une sinusite chronique homolatérale.



Ostéonécrose des maxillaires chez des patients traités
par bisphosphonates



La modification de la posologie des bisphosphonates
après l’apparition d’une ostéonécrose ne peut pas avoir
une incidence favorable immédiate sur l’évolution de la
lésion:en effet,les bisphosphonates absorbés n’ayant pas
été métabolisés, ils continuent à agir probablement
encore longtemps après l’arrêt du traitement; à titre
d’exemple, la demi-vie osseuse de l’alendronate varie
entre 1 à 10 ans selon le turn-over osseux20.
La physiopathologie de ces ostéonécroses n’est pas
totalement élucidée et plusieurs hypothèses sont évoquées.
Les bisphosphonates agissent sur les ostéoclastes
et provoquent une diminution du remodelage
osseux, donc une augmentation de la minéralisation
osseuse21 et, secondairement, une diminution de la
vascularisation osseuse comme dans toute affection
ostéo-condensante. L’effet anti-angiogénique, propre
aux aminobisphosphonates (principalement le zolédronate)
5, pourrait participer à la diminution de la
vascularisation. Les ostéonécroses sont donc très certainement
d’origine ischémique et, comme les bisphosphonates
ne sont pas métabolisés, le degré de
minéralisation et d’ischémie est sans doute en rapport
direct avec la dose cumulée.
D’autres facteurs, hormis ceux évoqués ci-dessus, ont
peut être un rôle pour expliquer la localisation exclusive
aux maxillaires. Dans les cas publiés, on trouve
peu de précisions sur les raisons qui ont motivé les
extractions dentaires qui, pour la plupart des auteurs,
auraient déclenché le processus d’ostéonécrose. Le
plus souvent, il semble plutôt s’agir d’un accident
infectieux ou inflammatoire, favorisé par l’ostéonécrose;
dans cette hypothèse, l’extraction dentaire révélerait
l’existence de l’ostéonécrose et elle n’en serait
donc pas la cause directe.
La présence d’une dent avec une atteinte
parodontale – ce qui signifie l’existence
d’une solution de continuité de la
muqueuse – favorise la contamination, à
partir de la flore buccale, de l’os en voie de
nécrose et cette contamination pourrait
même participer à l’apparition et l’extension
du processus de nécrose.
Comme dans la plupart des cas publiés,
le traitement comportait aussi une chimiothérapie
et/ou une radiothérapie ;
certains auteurs en ont déduit que les
bisphosphonates joueraient seulement le
rôle de co-facteur19. Cette hypothèse
étiopathogénique ne permet pas d’expliquer
les cas où on ne retrouve pas cette
association thérapeutique (par exemple,
le troisième et le huitième cas dans notre

Figure 4 Scintigraphie osseuse au Tc 99m (cas 1) montrant plusieurs
foyers hypercaptants. Cet examen ne permet pas de différencier
la nature des foyers : les foyers costaux font suspecter une origine
tumorale, celui du maxillaire correspond à l’inflammation induite
par l’ostéonécrose étendue ; cette inflammation touche même
le sinus maxillaire gauche.

Figure 5 Séquestre osseux d’aspect caractéristique (cas n° 1) : les travées, à bords
irréguliers, présentant un remaniement ostéoclasique sans ostéoclastes ; les logettes
ostéocytaires sont vides et, par endroits, on observe des amas de germes.





série). Il semble que l’ostéonécrose résulte principalement
d’une augmentation excessive de la minéralisation
secondaire à une dose accumulée de bisphosphonates
trop importante. Il serait donc souhaitable
d’entreprendre des investigations complémentaires
pour préciser le mode d’action et la demivie
des bisphosphonates, afin de trouver la posologie
la mieux adaptée pour chaque patient et/ou
pour chaque affection. Enfin, tant que les mécanismes
physiopathologiques de cette ostéonécrose
ne seront pas mieux connus, on ne pourra pas
s’empêcher de faire un parallèle avec l’ostéonécrose
des maxillaires due à la toxicité du phosphore22.
En attendant ces précisions, avant de prescrire des bisphosphonates,
le patient doit être informé de cette complication
éventuelle et éliminer les facteurs favorisants
potentiels.Les interventions de chirurgie implantaire doivent
être également déconseillées aux sujets en cours de
traitement23 ou ayant été traités récemment. Une mise
en état de la denture (soins d’hygiène et élimination des
foyers infectieux bucco-dentaires, traitement des caries,
contrôle de l’adaptation des prothèses amovibles)
devrait être réalisée systématiquement afin de limiter les
interventions et les soins dentaires pendant le traitement.
Lorsqu’un foyer d’ostéonécrose est apparu, il
semble judicieux de procéder, sans trop tarder, à l’ablation
de l’os nécrosé. C’est la meilleure façon de supprimer
l’exposition osseuse car sa persistance favorise l’infection
et entraîne une augmentation probable de la
taille du séquestre.


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